la pollution plastique
Généralités sur le plastique
La production de plastique mondiale
Depuis l’apparition des plastiques dans les années 50, la production mondiale n’a cessé d'augmenter. Plus de la moitié de la production mondiale a été effectuée au cours du 21ème siècle, et on estime que cette production pourrait encore augmenter de 40% d’ici 2030.
En 2020, la production mondiale de plastique était estimée à 367 millions de tonnes, dont 32% produit par la Chine, 19% par l’Amérique du Nord, et 17% par le reste de l’Asie. L'Europe contribue à hauteur de 15% à cette production avec 55 millions de tonnes produites en 2020.
La fabrication du plastique à partir du pétrole
Le plastique est le plus souvent fabriqué à partir de pétrole. Le pétrole est issu de la sédimentation de plancton qui a subi une transformation au cours de son enfouissement, et se retrouve piégé dans une réserve souterraine sous une couche de roche imperméable.
Pour extraire le pétrole, il est nécessaire de réaliser un forage, et de pomper le liquide jusqu’à la surface. Les pétroles dits “non conventionnels” nécessitent des techniques d’extraction plus coûteuses et avec un impact environnemental lourd. Le pétrole est ensuite traité en raffinerie et, par distillation, différents produits sont obtenus, comme le naphte. Le naphte va ensuite subir un craquage ayant pour but de "casser" les grosses molécules d’hydrocarbures en petites molécules plus faciles à travailler, comme l'éthylène. Ces petites molécules subiront ensuite une polymérisation c'est-à-dire un assemblage en une longue chaîne carbonée répétée.
Le plastique pose donc problème dès sa fabrication : non seulement le pétrole est une énergie non renouvelable (il faut des millions d'années pour la reconstituer), mais son processus d’extraction et de transformation en plastique libère du CO2 dans l’atmosphère, contribuant au réchauffement climatique.
La matière plastique
Le plastique est un matériau très résistant, léger et peu coûteux à produire, voilà pourquoi il a connu un tel succès ! Il est constitué de polymères carbonés dont la composition varie entre les types de plastiques, leur conférant différentes propriétés. On y ajoute également des produits chimiques, comme des colorants ou des retardateurs de flamme par exemple. On peut ainsi obtenir, à partir de la même matière première, une multitude de plastiques différents pour une multitude d’usages.
Remarque : les produits chimiques entrant dans leur composition sont souvent toxiques pour les écosystèmes.
On distingue 3 grandes familles de plastiques :
-
Les thermoplastiques qui prennent leur forme en refroidissant mais qui peuvent être de nouveau déformés et façonnés sous l'effet de la chaleur. Cette propriété les rend pour la plupart recyclables. Parmi les thermoplastiques, on trouve notamment les polyoléfines qui entrent dans la composition de nombreux sacs, jouets et emballages (le polyéthylène (PE) est le polymère de cette famille le plus répandu dans le monde). On trouve également les polyvinyliques (comme le PVC) qui composent par exemple les fibres synthétiques utilisées dans la confection de vêtements.
-
Les thermodurcissables qui ont une structure tridimensionnelle géométriquement figée une fois refroidis. Ils sont rigides, cassants, insolubles et infusibles, ce qui les rend non recyclables. Parmi ces plastiques, on compte les polyimides utilisés pour la fabrication de circuits imprimés ou de câbles. On trouve également les polyesters insaturés qui entrent dans la composition de laques, vernis et colles.
-
Les élastomères sont capables de supporter de grandes déformations avant de se casser. Parmi les élastomères, on trouve la gomme des pneumatiques et la semelle des chaussures.
Les secteurs qui utilisent le plus de plastique sont les secteurs de l'emballage, de la construction et de l'industrie textile.
Les principaux polymères produits sont les polyoléfines : le polypropylène (PP) et le polyéthylène (PE).
Le traitement des déchets plastiques
En Europe, sur les 29 millions de tonnes de déchets plastiques collectés en 2020, seulement 35 % ont été recyclés. Mais sur la part de déchets recyclés, la moitié sont exportés hors UE pour être traités. La part restante est soit enfouie (23%) soit incinérée (42%), permettant la récupération d’énergie mais ce qui libère également du CO2. En 2019, à l'échelle mondiale, les chercheurs ont estimé que la production et l'incinération de plastique avait propulsé plus de 850 millions de tonnes de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. D'ici 2050, ces émissions pourraient atteindre 2,8 milliards de tonnes.
Qu’ils soient brûlés ou transportés à l’autre bout du monde pour y être recyclés, le traitement des plastiques contribue au réchauffement climatique global.
La pollution océanique
Le trajet du plastique depuis son utilisation jusqu'à l'océan
La majorité de la pollution plastique trouvée en mer provient de la terre, et on estime que ⅓ des déchets plastiques se retrouvent dans la nature. Sur la production mondiale cumulée de plastique entre 1950 et 2017, estimée à 9 200 millions de tonnes, environ 7 000 millions de tonnes sont devenues des déchets plastiques. Parmi ces déchets, 1 000 millions de tonnes ont été incinérées (14 %) et 5 300 millions de tonnes (76 %) ont terminé leur course dans des décharges ou dans des flux de déchets non contrôlés.
2 900 millions de tonnes métriques sont encore utilisées, dont 700 millions de tonnes métriques (8 %) ont été recyclées. Sur l'ensemble du cycle de vie des plastiques, les pertes les plus importantes pour l'environnement se produisent pendant l'utilisation et la fin de vie.
Les sources de pollution plastique terrestres sont les sols agricoles, le secteur du bâtiment et de la construction, le secteur des transports (abrasion des pneus sur la chaussée ou peinture des marquages routiers), les produits cosmétiques et pharmaceutiques et bien sûr le secteur de l'emballage, dont on estime à l’échelle mondiale que 85% finit dans des décharges ou dans des flux de déchets non contrôlés.
C’est là qu’une partie des microplastiques est générée : ce sont les microplastiques primaires, dont les sources principales sont le lavement des vêtements en fibres synthétiques à la machine, l’abrasion des pneus des voitures sur la chaussée, les poussières urbaines. Certains produits cosmétiques contiennent également des microplastiques.
Malheureusement, les microplastiques se retrouvant dans les eaux usées ne sont pas traités dans les stations d’épuration à l’heure actuelle, et se retrouvent dans les eaux en sortie, ou bien dans les boues épandues sur les sols agricoles.
Les macro-déchets et les microplastiques primaires rejoignent alors les cours d’eau, les fleuves, et terminent leur course dans les mers et océans.
La pollution plastique n'est pas seulement d'origine terrestre.
Parmi les sources de pollution plastique marine, on trouve l’aquaculture, la pêche, le trafic maritime et le tourisme.
Le devenir des plastiques dans l'océan
Le plastique ne se dégrade jamais complètement. Une fois en mer, sous l’action mécanique des courants, des marées et des vents, l’action du soleil (photolyse) et de bactéries présentes à leur surface, les macrodéchets plastiques vont se fragmenter en particules plus petites, de taille inférieure à 5 mm : les microplastiques. On parle alors de microplastiques secondaires. On trouve également des particules encore plus petites, de taille inférieure à 1 micromètre, les nanoplastiques.
Les plastiques s’accumulent sur les plages, dans les sédiments le long des côtes, ou continuent de flotter à la surface des océans. On estime en effet que sur les 400 millions de tonnes de plastique produites environ chaque année, près des ⅔ des polymères synthétiques créés ont une densité inférieure à celle de l'eau de mer.
On observe des zones d’accumulation privilégiées des microplastiques au niveau des 5 gyres océaniques, ou sur certaines îles au milieu de l’océan Pacifique. Les plastiques sont également transportés via les courants de circulation thermohalins, pour certains jusqu’en Antarctique.
Avec un stock de plastique actuellement estimé à 1,2 millions de tonnes, la mer Méditerranée est également une zone d’accumulation importante de plastiques du fait de son caractère fermé et de son important bassin versant.
Une part non négligeable de plastique finit sa course au fond des océans, dans les sédiments marins profonds ou encore dans les fosses océaniques. Enfin, l’un des plus grand réservoir de plastiques estimé est celui de la biosphère marine, qui consomme les microplastiques.
Plastiques et océan, quel est le problème ?
La pollution plastique, et notamment microplastique, constitue un problème majeur pour le milieu marin et sa biodiversité.
Les macro-plastiques affectent surtout la macro-faune. Ils sont responsables de phénomènes d'obstruction des voies respiratoires et digestives mais également d'étranglements, de piégeages et de blessures pouvant conduire à la mort des animaux. Le phénomène de pêche fantôme, causé par des filets ou casiers abandonnés est également une cause de mortalité des poissons.
Mais la menace majeure provient des microplastiques, puisqu’ils sont facilement ingérés par les organismes et peuvent pénétrer les tissus. Des interactions physiques dues à la présence des particules dans le tractus digestif de l'animal peuvent engendrer des blessures internes et perturber la nutrition et la respiration. Il est également aujourd’hui démontré que les microplastiques peuvent transporter des polluants chimiques (soit parce qu'ils entraient dans la composition du plastique à l’origine, soit parce qu’ils s’y sont fixés une fois dans l’eau) ainsi que des microorganismes qui peuvent être pathogènes (et que l’on nomme la “plastisphère”). Une fois dans les organismes, certains polluants chimiques peuvent en perturber le fonctionnement (perturbateurs endocriniens, effets neurotoxiques, effets sur la reproduction, sur le développement etc.)
Les microplastiques ne sont pas éliminés complètement par les organismes marins, mais vont pour une partie s’accumuler dans les tissus de l’animal tout au long de sa vie (rein, foie par exemple). Lorsqu’un prédateur se nourrit de poisson, il va également avaler les microplastiques et polluants que ce dernier aura accumulés. C’est ainsi qu'en haut de la chaîne alimentaire, parmi les grands prédateurs, l'accumulation de microplastiques et de polluants chimiques est la plus forte. Ce phénomène se nomme la bioaccumulation.
L’homme, qui se nourrit à tous les niveaux de la chaîne alimentaire, consomme également les microplastiques et les polluants chimiques accumulés dans les poissons. On estime en effet que l’on consommerait jusqu’à 5 g de microplastique par semaine, soit l’équivalent d’une carte de crédit !
Enfin en perturbant les écosystèmes marins et notamment le phytoplancton, les microplastiques pourraient également perturber le rôle de séquestration de carbone des océans, et ainsi aggraver le réchauffement climatique !
Sources :
Thompson, R.C., Olsen, Y., Mitchell, R.P., Davis, A., Rowland, S.J., John, A.W.G., et al., 2004. Lost at sea: where is all the plastic? Science 304, 838. https://doi.org/10.1126/science.1094559.
Barnes, D.K., Galgani, F., Thompson, R.C., Barlaz, M., 2009. Accumulation and fragmentation of plastic debris in global environments. Philos. Trans. R. Soc. Lond. Ser. B Biol. Sci. 364, 1985–1998. https://doi.org/10.1098/rstb.2008.0205.
Plastics Europe Annual report of PlasticsEurope. «Plastics: the facts 2019». Available from : http://www.plasticseurope.org (Internet, cited April 2020).
United Nations Environment Programme (2021). From Pollution to Solution: A global assessment of marine litter and plastic pollution. Nairobi.
WWF. Fonds mondial pour la nature (2019). La pollution plastique : à qui la faute ?
Boucher, J. & Bilard, G. (2020). The Mediterranean: Mare plasticum. Gland, Switzerland: IUCN. x+62 pp